19 mars 2007
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Il y’a quelques semaines de cela .
Je devais aller retrouver une brunette du coté d’un obscur trou perdu village appelé St Pons , perdu quelque part dans ces zones ou règnent les forces du mal , j’ai nommé oiseaux gazouillants et vaches en liberté conditionnelle , zones que l’on nomme communément campagne , dans un soucis très propre à notre époque d’utiliser des euphémismes pour éviter d’appeler un chat un chat et un champs de betteraves un champs de betteraves .
Qui ne sait pas ce qu’est le stress de ce silence oppressant de la nuit sur cette foutue nature hostile a habité comme moi les 9/10 de sa vie dans un centre ville .
Je lui garde le téléphone de mon psy , d’ailleurs .
Ayant rendez vous à 18h , et ayant 2 petites heures de route devant moi , j’étais parti logiquement à 16h 17h , du moins si l’on évite de prendre en considération que j’ai perdu un temps somme toute pas forcément négligeable en prenant la direction d’Albi quand celle de Castres semblait beaucoup plus indiquée .
Le sens de la ponctualité me laisse autant de marbre que la campagne , de toute façon .
J’arrivais , après quelques péripéties et invectives à des conducteurs effroyablement lents , dans le village , et ratant fort logiquement mon point de rendez vous (« le premier tabac , tu peux pas le rater ! ») sous prétexte que le deuxième que j’apercevais me semblait beaucoup plus au centre de la bourgade -ce qui était un égarement indéniable de ma part : penser qu’il y’ait un centre sur 100 m² est une étourderie très nicolienne- , j’étais confronté à la réalité du terroir Français .
Massacre à la tronçonneuse , c’est presque gentillet comme film , en fait .
Le vieux édenté fixé à sa porte , que l’on se demande s’il ne s’y ait pas accroché avec la même super glue que j’avais utilisé a 6 ans pour fixer un poster au mur de ma chambre (les coûts de décollage et de tapisserie à refaire avaient été d’ailleurs mal vécus par l’autorité parentale) ; le groupe de jeunes réfléchissant visiblement à ce qu’il pourrait bien faire pour paraître plus oisif , ou afficher une tête plus patibulaire envers l’étranger conquistador que je paraissais être ; les vieilles dames impotentes qui me rendent d’habitude fou à un guichet de la poste , et qui auraient par leur age pas dépareillé en chœur de Jeanne Calment …
Décidemment , la bouffée de gasoil du 61 au démarrage et de bon matin place Jeanne d’Arc me réussit mieux .
Cette bouffée d’horreur d’air frais honorée , j’embarquais la brune et une sienne amie , et nous prenions joyeusement la direction d’une bourgade à peine plus peuplée quelque peu plus loin , peuplée au point que quelques équipements modernes y avaient été implantés pour dissiper l’impression première de campagne profonde , que le citadin ne pouvait qu’en avoir au premier abord et ce pour des raisons bien légitimes , j’insiste .
J’étouffais même un juron et promettait d’arrêter de boire lorsque je croyais voir un TER desservir le coin .
Trop d’anachronismes en peu de temps , il faut comprendre .
Nous arrivions enfin chez un couple de jeunes du coin , et avec qui nous avions projeté de dîner . Lorsque la porte de leur appartement s’ouvrait , j’étais confronté alors à la pire vision d’effroi qui puisse être offerte au regard sensible et insouciant d’un petit Nico dans la jeunesse de l’age , si si j’insiste .
Une petite fille .
Certes , vraiment petite , mais une petite fille bon dieu ! Ces jeunes , qui avaient mon age , tout à coup me jetaient sans état d’âme à la tête le témoin de mon age galopant , sous la forme d’une petite blonde courrant et sautant dans tous les sens , qui aurait elle arborer un t-shirt « toi aussi si tu étais moins con tu pourrais avoir actuellement ta propre petite tête brune » , n’aurait pas été une insulte plus violente à l’insouciance qui fait ma fierté .
Et ma décadence , aussi .
Jamais de ma vie , je n’ai autant vieilli qu’en une soirée comme celle la . Le dîner , extrêmement sympa et qui fut à peine gâché par le fait que lorsque je croyais faire un bon mot , je traitais de grosse l’une des meilleures amies des 7 personnes réunies autour de la table , ne fut pour moi qu’un long monologue interne , dans lequel je me faisais l’effroyable constat que les dîners de ce type n’avaient plus le goût de luxe de ma regrettée et fauchée jeunesse , mais plus celui beaucoup plus épouvantable de « mondain » , et dans lequel , Nico ne se voyait plus en Nico , mais en Monsieur Nico …
Plus jamais je ne fous les pieds à la campagne .
