Sortir avec un bi, c’est cool.
Déjà il faut réussir à l’avoir, y a le côté aventure, défi, conquête. Normal, y a deux fois plus de concurrence aussi, mine de rien. Il faut se battre. Eh oui, un garçon qui est à nos pieds dès la première seconde, prêt à se plier à nos quatre volontés et à déclarer sa flamme à la première occasion, ça n’a aucun intérêt, c’est beaucoup trop facile, au mieux on l’utilise quelque temps, au pire on le rejette misérablement. Alors que le bi, une fois qu’on l’a eu, on peut s’encenser fièrement : " c’est moi qui l’ai eu, c’est moi qu’il a préféré, avant toutes les autres, et avant TOUS les autres ". Grosse bouffée d’auto-satisfaction et croissance époustouflante du taux de confiance en soi. Aaah, ça fait du bien au moral de sortir avec un bi.
Et puis sortir avec un bi, ça fait très tendance aussi, ça entraîne forcément des réactions ; les plus admiratives (" Félicitations, beau tableau de chasse ", " Cooool ! "), les plus écoeurées (" Ah non mais vraiment, mais comment tu fais ? "), les plus sarcastiques (" Hun hun alors tu te prends des censuré ?! "), mais une chose est sûre ça ne laisse pas indifférent. Alors quand on sort avec un bi, on s’en vante, et on a bien raison, et oui, encore une fois, c’est bon pour le moral et pour l’ego toute cette attention soudaine que l’on porte à nos mœurs sexuelles.
Ensuite, le bi assume parfaitement sa part de féminité. Il va comparer la taille de ses cuisses à celle de son pote (tout de même, je dois avouer que cette conversation que j’ai surprise malgré moi m’a parue fondamentalement irréelle), faire des commentaires sur les boucles d’oreilles et les serre-têtes des copines, remarquer les nouvelles chaussures et voire même la nouvelle ombre à paupières. C’est un peu comme un copain-copine. Sortir avec un bi, c’est cool, et c’est divertissant.
Mais attention au revers de la médaille. On l’oublie toujours celui-là, mais ça serait tellement moins amusant sinon. Parce que la principale caractéristique du bi c’est quand même son instabilité. Il est indécis, confus, indéterminé. Il hésite, il est n’est émotionnellement pas équilibré, et ça se sent. Il souffre d’une cyclothymie exacerbée – pire que le pire des cyclothymiques, et je sais bien de quoi je parle – entre amour passion et indifférence glaciale. Alors en fin de compte sortir avec un bi, c’est peut-être cool mais c’est aussi très compliqué (je sais on pourrait croire que je me contredis, mais la phase compliquée, c’est motivant au début, mais C’EST TOUT). On ne sait jamais à quoi s’attendre, ni comment réagir, ni où se placer (et loin de moi tout jeu de mots ou idée mal placée). Et ça, c’est fatigant à la longue.
Enfin, quand on dit " bi ", on pense " sexuellement ouvert d’esprit ". Alors là pour le coup je me suis profondément fourvoyée. Totalement faite avoir. Ou il y a eu erreur sur la marchandise, ou alors y a une étape que j’ai pas du savoir déchiffrer dans le mode d’emploi. Faudra qu’on m’explique le phénomène un jour. Donc sortir avec un bi, ça peut paraître cool, mais ça ne l’est pas autant qu’on voudrait le laisser croire.
Au moment où j’écris l’indifférence glaciale a pris le pas – et bien comme il faut – sur la passion initiale, et j’attend patiemment (patiemment c’est synonyme de péniblement ?) qu’il ait les couilles de me dire que c’est fini.
C’est pas très très grave, je commence à avoir l’habitude de ce genre de situations maintenant, ça en devient presque répétitif.
Mais oui, j’en trouverai un bien.
J’en trouverai un bien…