Hier soir .
J’organisais chez moi une nouvelle partie de poker , étant devenu méchamment adepte de ce jeu depuis un an , espérant secrètement par ce biais devenir un brillant joueur imposant plus le respect que Mohamed Ali avant sa période Parkinsonienne , et surtout aux poches pleines en fin de partie .
Force m’est d’avouer que pour l’instant je fais surtout (sou)rire , particulièrement lorsque je me ramasse a faire tapis dès le 2eme tour avec un talent au bluff proche de celui du maire de Béthune assurant parcourir 400km en voiture en moins d’une heure quinze .
Le pseudo de « Pauv Nico » n’a jamais été autant d’actualité , des lors et évidemment .
La partie continuant donc sans moi , je cherchais une activité utile a masquer ma contrariété sous jacente a ma défaite un brin prématurée , aussi décidais je d’emprunter les clés de l’appartement de Mat , afin d’aller y trouver de quoi noyer mon amertume dans quelques bouteilles de vin périmées , récupérées un glacial soir devant la devanture d’un sommelier sans doute horrifié par l’inquiétante couleur marron qu’avait pris , entre autre , le rosé .
Sans parler du goût , touchant sans exagération ou presque a l’innommable .
(…)
« Ok , j’ai les bouteilles , j’ai pensé a rallumer la lumière dans l’escalier pour éviter de me ramasser lamentablement , j’ai mon portefeuille-ma-carte-bleue-mon-écharpe-grise-toute-neuve-dont-je-suis-fou , j’ai les clés , ok je peux y aller . »
Dans un élan de prudence dont je suis de fait peu coutumier , j’allais jusqu'à poser les bouteilles par terre , afin de ne pas prendre le moindre risque nullement inutile pour tout ce qui touche a mon manque d’habileté universellement reconnue , le coup du club de golf jouant a Titanic restant a mon grand dam durement ancré dans trop de mémoires .
L’histoire du Nico ramassant ses jetons de poker tout neuf éparpillés en pagaille sur une importante surface de la place Salengro a 3h du matin un 25 Décembre par –5° dehors , n’ayant heureusement pas encore eu le temps de (trop) circuler .
« Mais … c’est quoi cette serrure ? » s’interrogea soudainement le Nico , face a l’opposition vivace que lui opposait le ridicule bout de métal en face de lui .
Intrigué , je tentais de peser durement sur la clé , nonobstant le risque de me retrouver en situation de devoir la rendre en mode puzzle . Cette douloureuse expérience allait , de toute façon , n’obtenir aucun autre résultat que de me provoquer une vive douleur dans mon poignet , sinistrement vaincu .
Je cru voir un court instant la serrure me lancer un regard narquois .
… Un court instant , hein .
Je rouvrais la porte , et tentait d’analyser posément et sans trop m’énerver cette foutue serrure de merde qui commençait a me courir méchamment le pompon , constatant avec perplexité qu’elle fonctionnait a merveille , dans ce cas de figure .
J’essuyais mon front , d’un geste vaguement tremblant .
Je recommençais a forcer sur la serrure comme un sourd , l’injuriant , lui hurlant ma haine et détestation la plus vive , tapant dans la porte , sans obtenir d’autre résultat que me retrouver soudainement dans le noir , cette raclure de minuterie ayant visiblement décidé de prendre fait et cause pour ma nouvelle ennemie intime .
Une odeur plutôt inquiétante commençait maintenant a émaner de mes bras meurtris .
Je commençais a ruminer un plan de secours , qui me permette de me sortir de cette détestable situation sans avoir a provoquer de nouveaux bruyants sarcasmes de mes amis restés attablés autour de la partie de poker , songeant même a appeler un serrurier pour ne pas avoir a avouer ma sinistre déconfiture .
L’honneur d’un Nico pouvant bien des fois être a l’origine de mes somptuaires dépenses , comme je le disais l’autre jour a ma banquière , dont la vertu ne saurait souffrir des insultes moins vertueuses dont elle me gratifia a l’occasion .
Mais le combat psychologique avait -enfin- porté ses fruits . Tremblant probablement de toute sa ferraille a l’idée des tortures que je ne saurais que trop recommander au serrurier de lui prodiguer afin de venger mes nerfs lâchement assassinés , la serrure , dans ma dernière et désespérée tentative , joua .
Le cri de triomphe que je poussais fut a peine assourdi par l’effroyable vacarme que firent les bouteilles cognant le carrelage lorsque d’un mouvement un brin gauche , je les percutais …
(…)
Epilogue .
« Mat ? Arrête moi tout de suite si j’étais la encore en train de manifester une forme de trisomie tendance 21 , mais j’ai trouvé ta serrure … un peu dure , disons …
- Oui , il faut forcer un petit peu » , lâcha t’il sans visiblement faire attention au Danube s’écoulant joyeusement de mon front …
Plus jamais , jamais me faire sortir d’une partie de Poker avant le 3ème tour .