Hier soir, il faisait aux alentours de la place St Cyprien une température proche de celle qui faisait au Pôle Nord au paroxysme de l'ère glacière.
Dans ce froid sibérien, après m'être attelé à la plaisante tache consistant à nourrir le fauve de mon daron, je me retrouvais face à un de ces choix particulièrement cornélien qui parsèment la vie d'un Nico, tout en présentant un intérêt réel au moins aussi passionnant qu'un épisode inédit de Derrick.
Comment allais-je rentrer chez moi ?
Une aide visuelle s'impose pour une meilleure compréhension du récit par le néophyte ne vivant pas à Toulouse, mais dans des contrées beaucoup plus nordiques, genre et au hasard, comme l'ile de France.
J'en ai froid pour vous, mais passons.
Projo, Robert !
En rouge, la solution la plus simple qui s'offrait à moi, la solution du cancre par excellence et qui justifierait à posteriori si je l'adoptais les commentaires acides qui parsemaient ça et là mes bulletins de notes dans mes tendres années collégiennes.
... Enfin, dans mes bulletins « originaux », parce que dans ceux que voyait mon père, ces commentaires acides avaient laissé la place à ceux qui faisaient l'éloge d'un de mes camarades de classe qui avait bien voulu me prêter son bulletin à lui, histoire que je me fasse un montage arrangeant à coup de tipex et de photocopies, et que je ne rate plus jamais à cause d'un bulletin de notes trop peu flatteur l'hypothétique sortie d'un nouveau Jurrasic Park ...
Je me suis jamais remis d'avoir été privé de voir ce film au cinéma, papa.
Ta maison de retraite à Charleville Mézières, t'iras pas dire que tu l'auras pas volée.
Bref, cette solution de flemmard consistant à multiplier par 10 une distance somme toute modeste rien que pour ne pas avoir à marcher ne me convenait pas, d'autant que j'aurais vraiment eut des raisons cette fois de songer à l'arsenic la prochaine fois que suant dans un hammam, j'aurais eu le malheur de jeter un coup d'œil du coté de mon nombril.
« Tu verras Nico, on peut manger comme on veut jusqu'à 40 sans que cela se voit, et c'est après qu'on grossit », tu paieras pour ce mensonge qui m'a laissé espérer que boire 20 bières dans une soirée pourrait se faire sans conséquence regrettable pour ma silhouette de presque jeune homme, papa.
... Si quelqu'un a entendu parler d'une maison de retraite spécialisée pour les Pro-Anna, je suis preneur.
Bref, la solution métro s'avérant par trop connotée « légume bedonnant tout juste bon à regarder questions pour un champion », me restait 2 possibilités : m'hasarder à attendre un hypothétique bus qui aurait eut la vertu de me déposer juste en bas de chez moi, ou prendre un vélib (Vélô Toulouse, je ne peux m'empêcher de trouver cela grotesque comme appellation. Pourquoi pas Vel-Jean-Yves-Lafesse, tant qu'on y est ?).
Et courageusement, je décidais d'attendre un bus.
Courageusement, oui, parce que attendre un bus à Toulouse, cela relève de la torture mentale à faire frémir le plus blindé des tortionnaires de la Stasi. Personnellement, attendre dans le froid sans savoir combien de temps je vais devoir attendre, je rangerais cela dans la liste des crimes contre l'humanité les plus odieux, avec « être obligé d'écouter rire et chansons plus de 2h d'affilées » et « traverser en vélib le pont St Michel lorsqu'il est exposé à une petite brise de type Katrina ».
Ce qui était le cas ce soir là, d'ailleurs.
J'ai attendu. Et pareil que ce niais de Joe Dassin, ce foutu bus n'est jamais venu, du moins pendant les 20 minutes où j'ai grelotté à la Nicholson, en marchant frénétiquement d'un bout à l'autre du maigre abri, et en consultant toutes les 2 secondes la feuille des horaires, comme s'ils avaient pu miraculeusement changer entretemps.
Ne le niez pas, vous l'avez tous fait.
Petite remarque : vous avez remarqué comme on peut fixer limite avec passion le plan des transports pendant que l'on attend son/sa bus/rame ? Je pourrais limite vous redessiner les yeux fermés la moindre courbe de la ligne 61 tellement je me suis fait braire à attendre sur des quais, tiens.
Bref.
Après avoir hésité à décapsuler une grenade au passage du prochain bus qui passerait et qui ne serait toujours pas le mien, je finissais par me résoudre à me rendre à la borne de Vélibs qui me narguait 3 mètres plus loin depuis ces fameuses foutues 20 minutes.
Pendant que la borne me pille joyeusement mon compte de 150 euros (j'en ai toujours les mains qui tremblent, tiens. Un peu comme quand madame Julia me demandait si j'avais bien appris mes verbes irréguliers d'espagnols. Radasse, va), je guette fiévreusement l'arrivée du bus, prêt à annuler la transaction en cours.
Raison pour laquelle je ne fais pas gaffe au fait que je prends le seul vélib sans panier et avec la selle coincée à 10 mètres au dessus du sol (environ, hein), ce qui ne facilitera pas plus les choses lorsque je voudrais traverser le pont ma pile de DVD piqués chez mon daron sous le bras.
C'est un acompte on ne peut plus justifié, papa.
Le bus passe dans un vrombissement d'air glacé alors que je suis en train de tabasser la borne qui refuse de me louer un autre vélo que celui de clown que j'ai choisi.
Suivi d'un autre 30 secondes plus tard, d'ailleurs.
... Charleville Mézières, c'est finalement peut-être trop ensoleillé pour ressembler à une punition digne de ce nom susceptible de venger la traversée de ce foutu pont sur un vélib de clown, un 29 Décembre par -3°C, Dad.