Je n'ai jamais prétendu ne pas être aussi influençable qu'un moulin à vent en zone de cataclysmes météorologiques récurrents.
En l'occurrence, lorsque je me suis rendu naïvement et les doigts de pieds en trèfle au cinéma pour voir un film récemment sorti, « d'amour et d'eau fraiche », je pensais que j'en sortirais simplement ulcéré contre le monde actuel, la boule au ventre contre les stages et la grenade dégoupillée en main contre les jobs à 3 sous.
Sauf que. La réalisatrice ayant du considérer qu'après tout, c'eut été con de pas profiter des moyens de la prod pour s'offrir des vacances avant l'heure au soleil, une partie du film est tournée dans le Languedoc-Roussilon, où les acteurs principaux du film copulent allègrement dans des petites rivières ensoleillées et perdues.
Je ne me souviens même plus si j'ai attendu que le générique de fin soit terminé pour appeler les offices de tourisme de la région et leur demander où le film avait été joué précisément, s'il vous plait.
… Ce qui était d'autant plus con qu'à 23H et des poussières, y'a que dans Zelda que tu tombes sur des indics qui se souviennent subitement que les palmes sont paumées entre les mains d'un poisson hideux au fin fond du Nord-Est de la carte.
Mes références commencent à dater, oui.
(…)
1 jour et demi plus tard.
Ma Brune et moi roulons allègrement (ce qui ne veut rien dire, c'est bien évidemment ma 306 qui roule. Enfin, qui essaye de rouler, vous avez compris l'idée) vers le Languedoc-Roussillon, bien décidé(e)s :
- elle, à bronzer au soleil pour une petite après-midi romantique et tout et tout;
- moi, à prouver que y'a pas besoin de s'appeler Pio Marmai et d'avoir les cheveux faussement rebelles pour s'envoyer en l'air dans une rivière au soleil, ah mais.
Passés les 30 premiers kilomètres roulés à 30 km/heure, ce qui n'est pas pour me mettre de meilleure humeur qu'un présidentiable faisant la une du Canard Enchainé, nous arrivons à Carcassonne, où nous quittons l'autoroute pour une jolie petite route de campagne à peine vallonnée. A tel point que dans un moment d'incons... de bonne humeur retrouvée, je propose à ma brune de reconduire, ce qu'elle dédaigne faire non sans avoir le visage qui se teinte d'une jolie petite couleur type Casper, le gentil fantôme.
Ce en quoi je ne manquerais pas de l'imiter, lorsque glosant sur la facilité avec laquelle ma brune aurait pu s'acquitter de cette tache, je devais monter sur les freins au détour d'un virage à 360° en descente hardcore longeant un abime aussi sans fin que l'affaire Woerth.
On se fait des frayeurs, parfois, comme ca.
Nous arrivons donc soulagés au village de Lagrasse, que ma douce môman nous avait chaudement recommandé, bien que la perspective même d'un « village » ne m'enthousiasmait moyen, parce que dans le film, ils étaient au bord d'une rivière mais pas dans un village, eux.
Très influençable, vous dis-je.
Nous garons la voiture, et entamons la recherche de la petite rivière, en parcourant des rues désertes, en nonobstant bien sur la myriades de touristes dont la tenue vestimentaire aurait été plus adéquate au milieu d'EuroDisney ou du Parc Astérix. Au choix.
Sinon, la rivière, nous la trouvons, vachement jolie, et tout et tout. Mais étant donné la présence d'une marmaille de marmots (le pléonasme, c'est pour faire bien imagé. Ce serait con que vous situez pas le décor), nous décidons de suivre un chemin qui longe la rivière, jusqu'à arriver 3km plus loin à un endroit drôlement isolé, et qui aurait pu être le comble du romantisme.
Oui, très clairement, ca aurait pu être chouette si ca n'avait pas été méchamment à l'ombre, et si la tempête de 99 n'y avait élu domicile.
Lorsqu'il commença à menacer de neiger, nous émigrions au soleil. Donc avec les marmots, les chiens qui font wouf, les mamans qui braillent, le bonheur, quoi.
Adieu veaux, vaches, couvées et rapports sexuels au milieu d'une rivière du Languedoc, pour résumer.
(…)
J'en étais encore à réfléchir à la lettre d'insulte que j'allais écrire à la réalisatrice pour mettre comme ca sous le nez des gens des fantas... rêves inaccessibles sans donner le lien sur Google Map, lorsque à la sortie d'un virage, un excès de soleil couchant dans mon pare-insectes (oui, un pare-brise aussi couvert d'insectes écrasés, je vois pas d'autre appellation possible) nous envoyait tout droit, où plutôt la 306, dans un fossé dont un viticulteur hilare allait nous sortir au tracteur, pendant que je maugréais sur cette chienne de vie, et tout ca.
Le romantisme, c'est plus ce que c'était.