J'ai toujours eu horreur de la cantine.
Elle est d'ailleurs à l'origine de l'un de mes premiers souvenirs dans la catégorie « traumatisme qui me fait hérisser le poil dès que j'y repense ». La cantine de ma maternelle (oui, je peux très bien me souvenir de la maternelle sans pour autant penser à régler mes impots sur le revenu avant la mi-Septembre) avait servi un plat tellement immonde (genre variante de l'endive au jambon, mais en bouillie) qu'en sortant de table, j'en avais, passablement irrité, décidé d'être odieux avec le premier abruti qui vienne me titiller sur la couleur de mon tricycle (j'habitais alors une banlieue de Paris très bourge aux maternelles très cossues).
Manque de bol, c'était alors mon père, qui avait consacré toute sa pause de midi à traverser Paris pour venir me voir, qui avait écopé.
Inutile de dire qu'il n'a par conséquent plus jamais consacré sa pause à traverser Paris pour venir me voir depuis ce jour là.
Puisqu'on parle du Padre, je tiens à évoquer un point qui me tient particulièrement à coeur avec les parents qui lisent ce blog, les futurs parents ou ceux qui le sont et qui ne le savent pas encore.
J'ai toujours la peur de voir débarquer une ex suivie d'un gamin se ramassant sur la dernière marche de mon escalier.
Un point je disais, donc , que je voulais évoquer. Bougres de parents, comment voulez vous qu'un enfant normalement constitué, et à fortiori mais c'est un exemple, gaucher inversé à tendance droitier maladroit, puisse apprécier la cantine, lorsque vous usez de l'inscription à cette dernière comme d'une menace si « le carnet n'est pas terrible » ? Hein ?
D'ailleurs, la notion de carnet pas terrible me semble trop vague pour être honnête.
C'est pourquoi j'irais en appel mais un peu tard contre cette décision de m'avoir inscrit à la cantine au CE1.
Question de principe.
La cantine, c'est bien simple, j'y repense chaque fois que passant à proximité d'une forme marron tendance jaunatre, voir même que je passe en plein dedans ce qui est toujours désagréable surtout lorsque c'est le jour où je porte des tongs, l'odeur émanant de la substance à terre (ou de mes doigts de pieds, donc) arrive à mes narines.
Je viens de comprendre l'origine de l'expression « un souvenir cuisant ».
Le problème avec la cantine, ce n'est pas que l'on vous y servait de la merde : mais c'est aussi que l'on vous obligeait de la manger. C'est en effet entre ces tables octogonales, sur lesquelles tronaient des carafes dans lesquelles un crétin avait toujours mis du sel/du poivre/du pain voir les 3, que circulaient les pires tortionnaires que l'éducation nationale ait jamais enfantée: les surveillants de cantine.
On a tous le souvenir d'un surveillant de cantine qui nous a obligé à finir un steak au gras/un gras au steak quelque part dans notre tête.
Du moins ca m'arrange de le penser, cela me ferait mal d'être le seul à avoir subi les violences alimentaires répétées des sbires des pires cuisiniers que l'on ait vu depuis ceux travaillant chez Flunch.
... Brune est fan de Flunch.
Beuh.
Il n'y a qu'un souvenir lié à la cantine qui me fasse gentiment sourire. Enfin deux si on prend en compte la fois où au lycée, alors que ma toute nouvelle copine rigolait de moi en disant que j'avais aucune chance de découvrir son nom un jour, son nom clignotait derrière elle sur l'écran de contrôle de présence de la cantine. Mais donc, le seul souvenir véritablement potable qu'il me reste de la cantine, ce sont ces verres.
Mais oui ! Ces verres duralex, dans lesquels tous les gamins se sont amusés à lire leur age en ricanant de celui qui avait un age inférieur au sien, même que maintenant dans la vraie vie, c'est l'inverse !
Ces verres étaient donc l'une des rares raisons valables de se poiler à la cantine, même entouré d'endives au jambon. Eh bien quand je vois que l'entreprise Duralex fait faillite, je me dis que franchement, l'avenir s'annonce pas rose pour nos (futurs) bambins, tiens.
M'enfin, m'en fous, je veux pas de gamin, alors hein ...
Ps personnel : Eric, ce texte date de 2008, j'ai eu le temps de changer d'avis et ce n'est pas parce que tu lis ces lignes que tu n'aurais jamais du voir (je croyais légitimement qu'en 2020, internet serait démodé) que tu échapperas à la cantine.
Non mais tu as vu ton carnet de note ? Hein ?
