« Tiens, on a rencontré des amis de ta tante ce week-end ».
Passionnant. Je me reprendrais bien un peu d’arsenic, tiens.
« Figure toi que lui m’a abordé ainsi : je ne vous connais pas mais je connais votre fils. »
Sachant qu’il ne m’a vu qu’une fois il y’a 12 ans, forcément ça désoriente.
« Ah ? Mais en quoi l’avais je marqué ? », L’attention finalement accrochée.
« Vous aviez parlé de quelque chose, et tu n’avais cessé de lui dire qu’il avait tord, obstinément. Sachant qu’il avait le triple de ton age, forcément ça l’avait picoté … »
Aaaah. Lointaine époque, où je ne me laissais pas emmerder par le premier abruti de service …
(…)
Mardi dernier.
Après avoir reporté 3 fois le jour de l’état des lieux (rien de très anormal, donc), je retrouvais enfin en bas de mon nouvel ancien domicile la bonne femme de l’agence immobilière chargée de me persécuter, de toute évidence.
Il m’arrive de prendre en grippe des gens, mais je pense sincèrement que je n’ai pas eu à me forcer spécialement pour détester légitimement cette abominable logeuse de mes deux. Bien que mes collocs et moi ayions contribué à la faire figurer au Guinness des records en matière de frais d’agence immobilière (1000 euros, argh), cette sombre pouf nous traita sans doute avec autant de douceur que l’on ne traite un violeur récidiviste en milieu carcéral.
Mon dieu, ce qu’il l’a lourdé notre dossier . C’est bien simple, si l’on avait pu convertir en énergie ce qu’elle a dépensé en haussement d’épaules et soupirs alors qu’elle lisait la montagne de paperasse qu’elle nous avait mis en demeure de lui fournir, il aurait été possible de mettre en orbite autour de Pluton sa pesante mesquinerie.
La salope, comme aurait dit ce sympathique Devedjian.
Bref. C’était donc avec cette morue que le départ précipité de mes collocs m’avait contraint de passer quelques longues minutes, pas franchement adoucies par le fait que notre appartement, quoique en bon état apparent, avait tout de même subi quelques avanies qui eussent elle été subies par une vierge, auraient suffi à lui donner la réputation de Paris Hilton.
Je parle toujours d’appartement.
Je sais, faut suivre.
J’ai tout de suite senti qu’elle allait tout faire pour me donner l’envie de l’étriper.
Je l’ai regardé en serrant les dents. Elle a commencé à mouvoir son insupportable suffisance de pièce en pièce. Je la suivais, les mains dans le dos, la contemplant d’un regard assassin, du moins chaque fois qu’elle ne risquait pas de le croiser.
La gourde. Tellement occupée à critiquer la propreté de l’appartement, qu’elle ne voyait pas les énormités les plus flagrantes traces de notre passage dans l’appartement, à savoir une boiserie d’époque aussi défoncée que Doc Gynéco un soir de Nouvel an, des trous pratiqués dans le mur avec la même délicatesse que le loup qui en avait après 3 cochons, et un parquet …
Leerdamer ne mérite plus l’appellation de gruyère en comparaison.
Non, cette connasse n’a rien vu de tout cela. Tout ce qu’elle a trouvé à dire, c’était « mais vous viviez dans cette crasse ? Non mais ici, ça n’a pas été nettoyé ? Et qui s’occupait du nettoyage dans cette pièce ? Regardez, il y’a encore de la saleté ici ! »
(…)
Je me suis souvent demandé ce que cela faisait de grandir.
Dans ma décidément naïve jeunesse, je voulais absolument grandir, pour entre autre un jour posséder ma propre carte bleue.
Au rythme de 6 cartes bleues en moyenne par an, on peut appeler ça un trauma de jeunesse.
Aujourd’hui, je sais. Grandir, ce n’est pas posséder sa carte bleue.
C’est devoir regarder une pétasse, bourgeoise et mal baisée inspecter son ancien appartement, et surtout , savoir se retenir, bien que très difficilement, de lui faire avaler un balais par l’orifice le plus adapté tout en lui hurlant à l’oreille « Et ton cul ? Tu crois qu’il est propre, connasse ? » .
Ce que je donnerais pour revenir à mes 12 ans ...